icône Home © Michel Moutet, 2012
INTRODUCTION
I
SOMMAIRES

Double crime à "Pretty Cottage"

José ORTMANS
Editions Schmid, Collection L'Indice, 1938.

Selon son éditeur, « les œuvres de José Ortmans [alias Joseph Léonard Ortmans (1914-?), un auteur belge] ne restent pas longtemps à l’étalage » ; il semble in­diquer de belles ventes puisqu’il est déjà prévu, dans ce premier roman, « un nou­veau succès » pour son deuxième livre annoncé en fin d’ouvrage.
Et pourtant ce premier titre se présente mal puisqu’il ne correspond pas à l’his­toire racontée !
Double Crime à Pretty Cottage
"Pretty Cottage" est la propriété d’un grand col­lectionneur de pièces médiévales – dont des ar­mes – où ont été invités le chef de la Sûreté, Os­car Pape, et un célèbre détective anglais sur­nom­mé le « Sherlock Holmes moderne » ; ceci dans le cadre d’une réception organisée autour de la fille du riche collectionneur veuf.
Le lendemain, un cadavre est découvert en la personne d’un jeune participant qui, avec sa fian­cée, accompagnait un prétendant ; il a un poi­gnard Khmer de collection quasi unique enfoncé sous l’omoplate jusqu’à la garde… Et ce crime a eu lieu dans une maison isolée de l’extérieur (bar­reaux à toutes les fenêtres). Le parc était gar­dé par quatre féroces bergers allemands. Au­cune empreinte sur le poignard auparavant sus­pen­du au mur… Pas de doute, l’assassin fait partie des onze personnes présentes.
Bien sûr les méthodes d’investigation des deux Maîtres policiers diffèrent notablement : l’Anglais préfère « prendre l’atmosphère de la maison » en opposition aux « raisonnements » du Français.
Le deuxième crime est celui de la maîtresse du premier mort apparemment abattue par un autre jeune invité, la fille de la maison ayant tenté de dé­sarmer le présumé tueur (rivalité amou­reu­se ?). Une mystérieuse cale placée sous la porte a empêché le détective anglais de sortir de la bibliothèque et le chef de la Sûreté songe à jeter l’éponge tant les interrogatoires ne donnent rien. Pourtant tous les deux convoquent conjointement une reconstitution des deux crimes où chacun joue le rôle d’un des morts et expose sa solution ; les deux, bien sûr, se complétant. C’est là qu’on va découvrir que le titre du livre est vraiment très malheureusement choisi et les explications données un tas d’interrogations placées là uniquement pour détourner l’attention d’une énigme somme toute très banale, embrouillée et fort alambiquée. Ce qui n’empêche pas les deux policiers de s’enorgueillir de leurs propres résultats en des termes élogieux dont ceux-ci de la part du Français : « Le détective parfait groupera nos qualités respectives… Mais existera-t-il jamais ? ».
C’est pourtant avec cette intrigue minimaliste que l’éditeur, à la fin du deuxième volume, annonce comme réalisé « l’immense succès de ce plus prenant des romans policiers » avec 250 000 exemplaires vendus… en Angleterre ! Humour ou traduction ?

La Dernière Affaire d'Honoré Gordon

José ORTMANS
Editions Schmid, Collection L'Indice, 1938.

La dernière affaire d'Honoré Gordon

Dans ce second roman, assurément le meilleur, on retrouve Oscar Pape, cette fois secondé par celui dont ce sera bien « la dernière affaire », et pour cause ! Honoré Gordon, un vieillard de soi­xante-sept ans, ancienne gloire de la police ju­di­ciaire qui reprend du service à cette occasion. Pape, son ancien chef, est venu lui demander son aide pour arriver à mettre fin aux méfaits d'un tueur qui signe ses crimes sous le nom de « L'en­nemi » : danseuse transpercée d'une flèche, ri­che parfumeur empoisonné...
La prochaine victime doit être un romancier, le­quel est venu demander la protection de la po­li­ce. Malgré un important dispositif de sûreté mis en place à cet effet, aux douze coups de minuit de la nuit prévue, le romancier s'effondre dans les bras de son fauteuil : mort... empoisonné à la strychnine.
Du coup, Pape, menacé lui-même de mort, dé­mis­sionne. Quant à H. Gordon, il va voir sa fille adoptive kidnappée...
Le médecin légiste découvre que la dernière vic­time avait dans l'intestin un système en caout­chouc apte à « retarder » l'empoisonnement, le suc gastrique jouant le rôle de dissolvant lent. L’as­sassin est-il venu de l’extérieur ?
Et voilà qu'arrive l'échéance pour Pape menacé. Surveillé de toutes parts, il est retrouvé mort dans son fauteuil de cuir, empoisonné sans dou­te lui aussi. Tout porte alors à croire que Pape était lui-même « L'ennemi » et que sa lutte à l'en­contre du criminel n'était qu'une pièce jouée par le même et unique personnage...
Mais un coup de théâtre survient... cette affaire étant bien la dernière d'Honoré Gordon. Celui-ci, voulant tourner en ridicule son ancien chef, lequel, pas dupe, a simulé l'empoisonnement, par « un coup définitif », le vieillard en termine avec la vie au moyen de ce que contient le chaton de sa bague.
Une histoire bien menée, bien écrite, qui mérite les éloges sans qu'il soit besoin d’en rajouter.

Vacances tragiques

José ORTMANS
Editions Schmid, Collection L'Indice, 1939.

Vacances tragiques

Changement radical de style pour ce troisième ro­man de J. Ortmans aux Editions Schmid. Dans un avertissement solennel, le narrateur, signant Raymond Valbert, va nous livrer « un fragment du journal de sa vie » sans en changer un iota (sic).
Il s'agit de ses vacances à Berck-Plage qui vont, en effet, se révéler tragiques. Dans la pension d’un de ses oncles (Henri), où il arrive avec un autre oncle, il fait connaissance de pension­nai­res aux personnalités pittoresques : un ingénieur qui a inventé un "lève-malade" révolutionnaire mais dont l’état mental soulève des doutes, un dit Capitaine, boute-en-train de la maisonnée, un jeune homme blond, une jeune femme blonde et vaporeuse « trop belle pour être malade », pré­sente avec sa mère malade aussi, et une vieil­le femme « dont les os fondent peu à peu »
Or, l’oncle Henri, alcoolique invétéré, est re­trou­vé affalé dans le "lit" prototype avec un poignard enfoncé dans la poitrine. Qui l’a tué ? Le jeune narrateur se met à enquêter en parallèle avec le commissaire, le procureur et le juge d’instruction.
L'auteur cède alors à son habitude de semer des indices qui se révéleront n'avoir aucun rapport avec le drame : une nouvelle pensionnaire venue la veille et repartie au matin qui, finalement, ne se rappelle plus être venue ; une institution cli­nique implantée dans le coin qui abrite une bande de « terroristes » ; les avances de l'oncle à sa jeune pensionnaire entendues par la mère et le « Capitaine » sur lequel pèse des soupçons. En fait, la solution va être révélée au jeune narrateur en rêve : « Faut-il voir dans l'aspect des songes une espèce d'anticipation psychique vers l'avenir ? Après les événements d'au­jour­d'hui, je crois pouvoir répondre par l'affirmative », écrit-il en découvrant le rôle trouble de l'oncle accompagnateur et de la mère de la jeune malade. Mais la conclusion finale n'a pas voulu surgir dans son esprit. Et ceci, on l'apprend dans l'« appendice » où est révélé que l'oncle a été tué deux fois en une pâle resucée du Meurtre de Roger Ackroyd et du génial Crime de l'Orient-Express de la grande Agatha Christie. Un pâle pastiche qui manque d'originalité.

Apparemment, les publications de José Ort­mans furent perturbées par la guerre, ce qui est bien dommage. On ne sait ce qu'il devint après la fin des hostilités. Les dernières pu­bli­cations sous sa signature quelques courts fascicules publiés en 1941/1944 aux Edi­tions Picry et aux Editions de Lutèce. Il n'a­vait alors que 30 ans.

Michel GRANGER

critiques policiers

INTRODUCTION
I
SOMMAIRES
© Michel Moutet, 2017