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INTRODUCTION
I
SOMMAIRES

Les astro-archéologues

Les Captas ont toujours eu une vocation d'historiens et depuis que la science leur a ouvert les routes de l'espace, ils sont devenus les archéologues de l'Univers.

Leur renom s'est propagé jusque dans les régions les plus reculées, des Pléiades à l'étoile Véga, d'Antares à Procyon.

Tous les peuples du cycle de vie avancé ont fait appel à leur talent pour prospecter des planètes mortes aujourd'hui, mais dont la proximité nécessitait une con­nais­sance approfondie de ses antécédents. Comme aux temps héroïques de l'ar­chéo­lo­gie planétaire, la soif de savoir ce qu'il y avait avant n'est pas étanchée. Loin de là ! Aussi les Captas sont-ils sollicités tous azimuts.

Rompus aux raisonnements subtils utilisés par les paléontologues, les sociologues et les ethnographes, ils sont conditionnés, dès leur plus jeune âge, à leur future fonction. Ne faisant montre d'aucun chauvinisme rétrograde, ils usent à bon escient de toutes les techniques nouvelles brevetées par l'Inter-Galaxy, cet énorme com­plexe chargé de regrouper l'afflux sans cesse renouvelé des découvertes de l'u­ni­vers.

Au cours d'une de leurs expéditions, les Captas débarquent sur FolPlanet, un monde minuscule, troisième planète d'un système qui en compte neuf et dont l'astre central commence à décliner.

L'aspect de ce ridicule planétoïde ne présente rien de particulier sinon qu'il paraît noyé dans un perpétuel nuage de poussière, lequel lui confère une lugubre couleur grisâtre.

On comprend que toute vie ait disparu depuis des temps immémoriaux de cette planète inhospitalière et, actuellement, il faudrait un organisme bougrement sophistiqué pour y subsister un quart de seconde sans dispositif respiratoire. De plus, la radioactivité y est élevée, ce qui ne gêne aucunement les Captas mais serait fatal à bon nombre de races humanoïdes. La légende galactique prétend que les habitants ont signé l'acte de leur destruction quelques décennies seulement après avoir découvert l'énergie atomique. Ce peuple fut trop stupide pour l'employer à d'autres fins que celles de la guerre et la mort.

Les archives affirment aussi que Fol-Planet n'est qu'un surnom et que sa véritable appellation est TERRE...

Aussitôt leurs appendices mobiles posés sur le sol de Fol-Planet, les Captas com­mencent leurs fouilles. Et petit à petit, ils parviennent à reconstituer des bribes de l'histoire de Fol-Planet.

Cependant ils ont mis au jour un petit objet qu'ils n'ont pas identifié et qui les intrigue. C'est un cylindre de 7 centimètres de long et 8 millimètres de diamètre à l'intérieur duquel foisonne une paille assez fine, presque une poudre. Sur l'en­ve­loppe cylindrique est imprimée une inscription délavée, illisible. Quel mystère dis­si­mule cette petite merveille ? A quelle destination secrète a-t-elle été manu­fac­tu­rée ? Autant d'énigmes pour les Captas, eux qui précisément ne les apprécient guère.

Ils mettent, en effet, leur point d'honneur à élucider tout détail incompréhensible. Peut-être, dans cet objet, réside la grande vérité de ce peuple disparu ? Toutes leurs techniques sont successivement mises en batterie: rayons Y, temporisateur moléculaire et autres taclamètres. Toutes les données recueillies sont entrées dans l'ordinateur de bord de leur astronef. L'énigme récalcitrante devient leur pré­oc­cu­pa­tion première. Et il n'y a rien de plus efficace qu'un Capta perplexe...

Un jour, au terme d'une activation photo-ionique de la matière, l'inscription apparaît clairement sur le petit cylindre. On y lit deux mots d'une langue morte et oubliée depuis des millénaires.

Mais que peut bien signifier cette épitaphe : "Gauloises filtre"… ?

Un comble, les Captas ne sont pas fumeurs

Michel GRANGER


Publié in Le Courrier de Saône & Loire Dimanche du 22 mai 1988.
Dernière mise à jour : 21 novembre 2010.


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